Approche

Le chercheur de passages

En dépit des modes et des émergences versatiles du marché international, l’art construit continue d’affirmer l’austérité de ses principes fédérateurs et d’attirer de nouvelles générations d’artistesépris d’ordre et de mesure. À l’écart, cependant, de l’orthodoxie des pionniers, les tenants de l’art géométrique contemporain ont su se ménager des chemins buissonniers, même s’ils n’ont pas faittable rase sur les canons fondateurs de la tendance.

Par tempérament, au vu de l’ensemble de son processus, Satoru Sato ne s’est jamais abandonné à l’inexactitude et à l’approximatif.
Peintre, sculpteur, liant parfois les deux genres, auteur d’innombrables estampes, il cultive depuis ses débuts l’esprit de sacrifice, une dévotion au simple nécessaire, qui renvoient à ses origines extrême-orientales. Passé de la peinture à la troisième dimension et progressivement à l’art monumental, on recense en permanence chez lui cette faculté d’alterner le plein et le vide, cette retenue et
cette justesse harmonique dans la déclinaison de ses rythmes, enfin, ce sens de l’espace, qui confèrent à son œuvre sa plénitude et son aura.

Né à Ishinomori, au Japon, dans la province de Miyagi, au sein d’un cadre familial réceptif aux Arts traditionnels et à la modernité de son temps, il effectue ses premiers essais picturaux vers sa
dixième année et s’initie à la calligraphie. Ses vagabondages livresques l’amènent à la connaissance des grands classiques, Kupka, Villon, Matisse, Picasso, et le conduisent à intégrer l’École
des Beaux-Arts « Toyo » à Tokyo, où son diplôme obtenu, il réalise une exposition inaugurale dans la capitale de son pays, avant de s’installer à Paris en 1969, et d’y enrichir son cursus à l’École des Beaux-Arts, jusqu’en 1974, tout en inventoriant le panorama des galeries et des musées. Néanmoins, outre le Bauhaus, le mouvement de Stijl, et le choc reçu face à la majesté janséniste des pyramides, lors d’un périple égyptien, ce sont les contacts fervents entretenus avec quelques-uns des artistes les plus notoires du constructivisme à Paris: Leppien, Bozzolini, Seuphor, Aurélie
Nemours, Contreras, et légèrement plus tard Cruz Diez et Soto, qui contribueront à cimenter durablement sa grammaire stylistique. Dans le droit fil de sa pensée rationnelle et de sa connivence avec la nature, se fait jour l’axe portant de son itinéraire: dire le plus avec le moins.

Mais les créateurs sont ils des passeurs?
Quelles voies invisibles ont-ils déjà empruntées pour nous entraîner sur ces routes nulle part signalées sur la terre?
Et de notre côté, quelles frontières rebelles rêvons-nous de vaincre, en tentant de déchiffrer le sillage de leurs avancées?

Chaque création de l’homme n’est-elle pas un repère déposé à dessein par un traceur de passages, qui ignore peut-être lui-même vers quelle secrète contrée il se dirige? Saint Jean de la Croix nous le remémore: « Si tu veux trouver ton chemin, il faut fermer les yeux et marcher dans la nuit ». Par conséquent, la trajectoire d’un créateur doit-elle nous indiquer où il s’aventure? Du moins, nous croyons savoir ses origines, la nation qui résonne au plus profond de son être, et la civilisation qui a veillé sinon éveillé ses émois formateurs. Mais s’il se tourne vers la non-figuration, comment pouvons-nous vraiment discerner sa fibre originelle?
D’autant plus qu’un tel choix relève souvent d’une rupture géo-culturelle, pour ces artistes venus en Occident affermir leur langage ou conforter celui des images émancipées du connu.
En l’occurrence, bien qu’ayant été attiré par l’abstraction encore étudiant à Tokyo, Satoru Sato ne l’adopte véritablement qu’à l’École des Beaux-Arts de Paris. Cette voie lui ouvre des perspectives différentes, la liberté de s’abstraire, d’enlacer le non-visible par l’effacement des figures. Cette phase transitoire peut notamment s’observer au gré de plusieurs compositions prémonitoires.

Ainsi, en 1968 toujours à Tokyo, deux études à l’huile cernent un nu féminin frontal, en posture assise, jambes écartées. Cette femme au faciès sans âge, trône dans un fauteuil sur la première toile, tandis que sur la seconde, sa morphologie se délite, le corps ne comportant déjà plus ni bras, ni tête, et le siège à présent schématisé, confond partiellement ses formes avec un faisceau de verticales. Deux ans après, la verticalité se retrouve dans l’architecture d’une toile exécutée à Paris, en 1970, où ne subsistent plus que deux barres noires dressées, ne laissant entre elles qu’une faille effleurée par les pointes de deux triangles colorés, qui la désignent comme point d’appétence. La superposition de ces trois œuvres de format identique, énonce davantage que l’évacuation de l’organique la transposition d’une anatomie en son substrat emblématique, la matrice se transformant en motif géométrique.

Le peintre a volontairement éprouvé le besoin de symboliser ce qu’il affichait antérieurement. L’évocation d’une ruse de l’inconscient s’avérant insuffisante, le recours à l’abstrait est dorénavant l’immanquable tremplin pour aller plus loin dans le parcours de la conscience. Il ne s’agit plus de représenter le banal objet du désir, mais le désir lui-même, sa force et sa frayeur, la violence de son élan et ses mystères lents, tout ce que la géométrisation des émotions donnerait l’illusion de maîtriser. Dans ces régions, les pouvoirs régulés de l’abstrait sous-tendent une aspiration plus conquérante, un désir dont la fente sexuée n’aurait été que le prétexte, en d’autres termes, le passage premier: en somme, l’ensemble de l’œuvre de Satoru Sato, bâtie globalement sur la verticalité, dévide la quête du passage.

Dans les années 1970, il traque la couleur dans une série de toiles où dominent des losanges. Leur aménagement concentrique ordonne une pente formelle vers le point focal, expérience déjà tentée par un jeu de triangles dans une œuvre précédente, en 1969, Sans titre, espace ». Toutefois, la blanche verticale à l’extrémité
de ces étranges tunnels visuels, est-elle le rai d’une étroite issue où l’acier d’une ligne parasitant le passage? Puis, des bandes levées
et colorées envahissent la surface, et le losange qui parfois affleure en transparence, devient le prisme vecteur de cette décomposition de la lumière en toutes ses nuances, « Sans titre », en 1972.

Analysant, en 1995, la période 1970-1980, j’écrivais: « Parallèlement à son ouvrage pictural basé sur l’opposition des aplats chromatiques, la netteté de l’articulation de ses unités, la recherche d’une égale luminosité et la variété combinatoire des structures, à travers des dispositifs verticaux ou horizontaux décalés ou triangulaires greffés de baguettes de bois asymétriquement posées, Satoru commence à engendrer, dès 1977, des constructions en bois peint, sortes de reliefs quadrangulaires pyramidaux, triangulaires ou interstitiels, qui en repoussant les limites de plan, ne sont pas encore des sculptures douées d’autonomie, mais s’en
rapprochent imparablement ». Et j’ajoutai: « afin de détacher la matérialité de la trame, sans aucune référence aux idéologues de Support-Surface, préoccupés avant tout par la nature des constituants de leurs problématiques, il se penche sur l’emploi et le sens de ses matériaux, en peignant sur toile écrue et en éliminant pratiquement le support, dévoilant une large fraction du mur sur lequel
elle repose.

Cette approche n’a pas changé aujourd’hui. Mais par ailleurs, les lignes colorées debout délimitant les toiles de Satoru, pourraient suggérer aux exégètes japonisants les frises latérales de certains kakemonos déroulant l’historiographie fabuleuse de Cakya- Muni, de Kannon ou de Jizô, le protecteur des enfants et des voyages.
Toutefois, les situations auraient disparu du film imaginaire, et faute d’écran où profiler les souvenirs sacrés, la monochromie déclare la signifiance de son vide méditatif. À cet égard, une œuvre nous dit que ce vide sous-entend un récit disparu ou à venir, car elle le transmue en livre vierge, dont les tranches dont les tranches forment les liserés chromatiques latéraux, comme dans « Livre avec lignes verticales » de 1980.

Poursuivant ses investigations sur la non-dépendance systématique de l’œuvre à son support traditionnel, Satoru, à partir du milieu des années 1980, abandonne son travail sur la couleur pour privilégier la matière, ou mieux, le matériau. Les verticales se trouvent alors complétées et finalement remplacées par des grilles verticales de bois ajourées sur des rails horizontaux, et occasionnellement de carrés superposés en suspens. Ce parti pris sculptural désormais prioritaire, organise et définit un champ spatial subdivisé en divers compartiments, de temps à autre escorté de petites toiles attenantes, monochromes ou coupées par une ligne inclinée.

Tout au long de cette décennie, Satoru paraît inlassablement identifier la faille dans la barrière, le faufilement possible entre deux balustres, le moyen de contourner l’obstacle qui s’oppose à sa volonté. Mais on ne l’ignore pas, chaque artiste lutte contre les contraintes qu’il s’impose.
Parfois, cette structure n’est pas fixée sur la toile, mais sur un bâtiment historique, générant cette « Distance constructive » en 1986, ou bien encore elle rehausse l’uniformité d’un édifice industriel,
avec son armature donnant sur une ample verrière, en redoublant à taille réduite les volumes rectangulaires et la fonction de frontière. Enfin, dans une œuvre de 1988, « Vent, bois, fer », la barrière se fait haute et compacte, striée en diagonale, clôture d’une tentative pariétale qui appelle des prolongements. En effet, ce mur planté à ciel ouvert n’est plus une valeur ajoutée à une toile ou àune façade, mais une sculpture à part entière.

Dès la fin de la décennie 1970-1980, Satoru s’adonne donc principalement à la sculpture, par l’entremise de volumes en extension qui rêvent d’évasion et de passage, même si ses manifestations picturales se multiplient aux quatre coins du monde. Voient le jour successivement, une importante mosaïque au Japon, un environnement en béton et métal en France, à Bourg en Bresse, et beaucoup d’autres réalisations en granit tissées de plusieurs éléments.

Les triangles picturaux qui se pressaient de plus en plus derrière les grilles prennent de l’épaisseur, en témoigne « Structure et espace » en 1989. Par cette puissance codificatrice progressive- ment déployée, Satoru élargit son registre et accède avec une lucidité volontaire à son vocabulaire d’élection. Et ce registre patiemment affiné, le propulse vers la dimension monumentale, autrement formulé, vers l’abolition des frontières entre l’œuvre et son milieu, où la sculpture n’est plus qu’un signe dans l’univers urbain ou paysagé, n’ayant rien d’autre à revendiquer que l’autosuffisance de sa masse, malgré, ici, des réminiscences implicites, des
déboitages et des tensions nécessaires à sa viabilité.

En cela, l’art-public, chez Satoru, se démarque du dogme minimaliste, impersonnel et déshumanisé. Amoureux de la forme élémentaire, il ne dédaigne pourtant pas les colonnes cannelées, les encoches inversées, mais il sait que le primat, dans le monumental, réside dans la spécificité du matériau qui l’instruit, et particulièrement, dans le positionnement donné au matériau.

Dans << Structure, silence I » en 1988, la pointe de diamant surgissant du sol, juste au centre d’un cadre de béton, devient montagne arrêtée en son développement, par un carcan trop étroit, comme si l’on était à même de marginaliser un sommet, de retenir une force tellurique par un simple collier, ainsi dans « Pyramides » en 1988.
Quant aux deux barres récurrentes des premières peintures abstraites de Satoru, elles se sont muées en deux colonnes de granit souvent en retrait l’une de l’autre, excipant chacune en sa face
intérieure une découpe similaire, ajustant sous un certain angle les deux bords d’une fente, tel « Unexcluded Space II » en 1992; mais également« Unexcluded Space I » de la même année, où la fente verticale ouverte illustre ce que savent les anthropologues ou les archéologues: un monolithe n’est pas obligatoirement un objet glorifiant dieu ou un mâle ancêtre, certaines pierres se révélant déesses par la simple vertu d’une entaille creusée au moment de leur avènement.

Corrélativement à cette œuvre énigmatique, « Hisho», en 1990, met en exergue une tournure différente pour utiliser la scission des plans, puisque cette ogive insolite est composée d’un bloc maternel et d’un bloc rejeton qui semble quémander sa protection, de sorte que les deux pudiques silhouettes, se touchant à peine, induisent l’arc-boutant du temple secret des sentiments. La fente ressurgit en 1993, dans « Verticalisme Kyoei », innervée dans un agencement métallique, frêle aguicheuse d’un groupe triangulaire peinture-sculpture, sur et auprès d’un hangar. Fort de toutes ses mémoires, Satoru campe un singulier dolmen au cœur d’une aire
gazonnée, ou implante de sinisants portails circulaires accompagnés d’unités pierreuses efficacement dispersées à même le sol.

Sanctuaire baigné de spiritualité ou hymne au règne naturel,  » Soleil, lune, eau et vent  » en 1994, convie les astres et la terre en un temple à l’air libre, où les matériaux s’emploient à ciseler la lumière. Fontaine avec escalier, porte géante surmontée de deux poutres de béton guettant la note du vent, célèbrent encore la liturgie du regard qui veut traverser l’œuvre. Et le sculpteur poursuit
son chemin, le transforme en œuvre, à l’instar de ces volumes répétés et affaissés, séparés chacun du suivant par l’intervalle d’un pas, qui souhaitent franchir à pied sec une invisible rivière.
Maintenant, loin d’avoir épuisé les réalisations individuelles de Satoru, mais en ayant relevé les pivots cristallisateurs, abordons un chapitre choisi de sa démarche: le cycle ininterrompu de ses participations à des expériences collectives, sous le label convenu de symposiums, en compagnie de certains des plus remarquables praticiens de ce type d’art, de Karavan à Warren, de Staccioli à Dietman, de Carneiro à Naraha, de Du Bon à Le Parc, de Brusseو à Cami…

D’abord, il y aura en 1992, le symposium de Minamikata, au nord du Japon, dont il est impulseur et acteur. Il y peaufine une pièce verticale en granit bleu, dans une éclaircie forestière, où deux poutres décalées autour d’une brèche, se jaugent et sollicitent les feux solaires, en favorisant une autre lecture du paysage, devant un court chemin de pierre. On chevauche, de nouveau un sentier de marches dallées en déclivité, lors du symposium de Clermont-Ferrand, en 1996, qui nous fait glisser tout au bout entre deux hautes colonnades parallèles, pylônes de cet hypothétique pont filé à même la terre. C’est au tour du symposium de Santo Tirso, près de Porto, en 1997, de susciter la levée de quatre colonnes carrées en béton, dont deux tronquées en aval et en biseau, à l’intersection d’un carrefour, balisées par une sente de pierres harmonieusement calibrées. Dans la foulée, le symposium de Quito, en Équateur, offre à Satoru les superbes étendues de son parc métropolitain, en 1998. Dans ce cadre unique, s’élèvent d’immenses colonnes en béton face à face, dont certaines à mi- hauteur occupent le couloir médian. Il poursuit là son appropriation de l’espace, en véritable décorateur du paysage, au sens noble du terme, par sa manière distinctive de proportionner avec une fermeté subtile, pierres et totems connotés par une interminable promenade pierreuse. Au symposium de Puyo, Corée du Sud, en 1999, neuf colonnes de granit à égale distance l’une de l’autre, ceinturent une structure triangulaire, en laissant respirer au maximum les béances ainsi dessinées. En 2000, le sculpteur officie encore au pays du matin calme en deux occasions, aux symposiums de Sanchung et de Busan. Dans le premier, deux poutres en granit sobres et altières, regardent un bâtiment au loin, pendant que le second héberge une seule colonne également en granit, flanquée d’un élément arrondi ouvert en son milieu et de plusieurs autres alignés en progression constante. Année prolifique, 2000 ramène Satoru au Portugal pour le symposium de Cantanhede, où il érige, dans un jardin, une porte massive en pierre d’Ança, agrémentée d’une fenêtre trapézoïdale à sa base, destinée à laisser s’écouler un flux aquatique. Enfin, 2001 est à l’heure du Liban, pour le symposium d’Aley, près de Beyrouth.

Mais conjointement et auparavant, au cours de l’ultime décennie, Satoru n’a cessé de produire et d’essaimer des groupes sculptés et des environnements. Dans son style caractéristique, différentes œuvres à colonnades naissent à Oeunato, Nakada et Ishinimori, de 1996 à 2000. Un canal évanoui, déjà croisé, est peut-être, en 1994,un  » Rêve de cygne « : une allée à peine scandée de pavés affleurant à la surface herbue d’un lac éludé, d’où ne jaillissent que les poteaux sustentateurs de ce pont improbable. Éveilleur de gués, pontonnier de l’imperceptible, Satoru est requis, en 1995, pour concevoir le « Pont des Arts de Natsukawa »,
ouvrage pour automobiles avides, mais nappé de passages pour piétons de la pensée, qui prendraient le loisir d’inventer, au vu de toutes les figures géométriques aux couleurs prononcées, un nouveau code de la route des hommes. Mixant le béton, le métal et la pierre, en un monumental résumé du trajet accompli, de la peinture à la sculpture, mitoyenne de l’architecture, cette empreinte sur le paysage stimule les épousailles de la modernité et de la mémoire, en plaçant sur le grand tablier droit une structure semi-circulaire, rappel de ces petites passerelles en dos d’âne, qui enjambent les eaux promeneuses des jardins de la tradition japonaise.

En 2000, sa région natale propose à Satoru un projet presque démesuré: animer et imaginer, à partir de sa sculpture environnementale, l’habillage d’un jardin de deux hectares et demi, le parc Suwa. Rompu aux variations d’échelle, adossé à une logistique parfaite, méthodique et concentré, il installe graduellement, autour d’une promenade bleutée, l’ensemble des éléments et des matériaux de sa syntaxe, sous l’intitulé «Passé, présent, futur».
Auvents revêtus des signaux de sa peinture, aires ludiques, canaux bordés de parapets gazonnés en arc de cercle, tumuli contrastés, plans d’eau, forum concentrique, allées bornées de morceaux de
granit, colonnes campées en escalier, tout est aéré, réparti avec concision et une conscience claire de l’espace à codifier, pour une heureuse réussite.
Si l’on remarque, comme une constante, un couple de hautes colonnes carrées ou rectangulaires de face ou de profil, se manifeste parfois une colonne ronde, dont le fût scindé diamétralement, s’écarte pour faciliter le passage entre deux demi-cylindres. Et dans ses finitions, Satoru aime aussi confronter le lisse et le grenu, les cassures angulaires et le rectiligne, la courbe douce et la rigidité, les séries alignées et les moutonnements, l’empilement de rondins de granit et le dépouillement radical, toutes les figures compliquant le point de fuite de la rétine, dont l’apothéose, depuis des siècles, se tient dans la sublime sérénité du jardin du temple Ryoanji de Kyoto.

On le constatera aisément, dans la complémentarité de ses diffluences, la démarche de Satoru Sato distille un sentiment très personnel et une cohérence surveillée dans ses objectifs. Au som- met de leurs tensions, gardiennes de leurs propriétés intrinsèques, ses formes peintes et sculptées sont à la fois les relais de sa pensée et la synthèse de ses affects.
Discrètement hiérarchisées, elles nous parlent de proportions, d’équilibre, de rigueur et d’indépendance, tout en avouant leur fidélité à un concept de base. Nourrie par une riche énergie intérieure, ascétique sans froideur, audacieuse sans tapage, aujourd’hui parvenue à maturité, l’œuvre de Satoru Sato ne cherche plus le passage, elle est le passage.

Gérard Xuriguera